Publié le 23 avril 2020

Boulogne-sur-Mer - Amateurs d’auto-tune*, de textes insipides et de rimes bancales : passez votre chemin. L’art du fauve n’est pas pour vous. Ou peut-être bien que si après tout. Car écouter Le Tigre, c’est se rappeler que le rap n’a pas toujours été un produit de grande consommation.

 

À 45 ans, celui qui a découvert le rap au collège avec Sidney et son émission de télé légendaire, les clips sur MTV chez les copains qui avaient le câble et chez les disquaires anglais, fait partie des précurseurs du rap français : "Quand j’étais ado, personne n’écoutait du rap à Boulogne-sur-Mer. J’ai grandi entouré de musiciens, mais tous écoutaient du rock ou du métal. À l’époque, il n’y avait pas internet, donc si tu t’intéressais au hip-hop, il fallait être à l'affût du moindre signe : un peu de danse à la télé, un graff qui attire ton attention, un morceau de rap dans la bande originale d’un film… Pour moi c’était vraiment un OVNI ce truc qui mélangeait la danse, la musique, l’art et une certaine vision du monde : c’était complètement nouveau !"

Fonds de tiroirs

Connu à Boulogne comme le loup blanc pour sa passion pour le hip-hop, certains ont su retrouver sa trace et remonter la piste du Tigre : "C’est à cette époque-là que j’ai rejoint mon premier groupe et rencontré Kefristo. Ensuite j’ai fait la rencontre de Mathieu, Cosmos, avec qui j’ai monté L’Oreille Cassée. Puis il y a eu toute l’équipe de Welsh Recordz, et plus récemment avec les musiciens d’Ondéelune "

 

le tigre
De fil en aiguille, l’instinct du félin s’est affûté. Ses rimes et ses griffes aussi. Patient, tapi dans l’ombre, quand Le Tigre flaire une opportunité, il bondit : "Pour les concerts, même si j’ai eu la chance d'en faire pas mal, je ne cours pas après les dates. Et pour ce qui est du cachet, ce n’est clairement pas la première chose à laquelle je m’intéresse. Par contre quand on me propose quelque chose qui me plaît vraiment, je saute sur l’occasion."

Tout vient à point à qui sait attendre

Quand de nombreux rappeurs visent les sommets et surfent sur les dernières tendances sans pour autant réussir à décoller, le Boulonnais a fait le choix inverse. Sans rogner sur la richesse des rimes et du vocabulaire, sans chercher la célébrité et sans s’inventer une vie de gangster, Le Tigre a pu frôler les étoiles et continue de tracer son chemin dans la jungle du hip-hop français. Pour celui qui, à ses débuts, a joué en première partie de Lunatic à l’époque où Booba préférait le rap au marketing, les rencontres et les bonnes surprises se sont succédé : "Quand j’ai commencé, on devait être à peine une dizaine à écouter du rap à Boulogne. Alors imaginer qu’un jour, j’aurais pu sortir un album, entendre ma voix sur un vinyle, partager la scène avec des gros noms du rap français (Gérard Baste...)… Ou encore jouer sur une scène énorme devant plusieurs milliers de personnes (en première partie d’Orelsan), rapper accompagné par des musiciens lors d’un festival de jazz ou avoir un de mes morceaux sur une mixtape slovaque… C’était impensable ! Toutes ces choses géniales, jamais je n’ai osé en rêver. Pourtant c’est arrivé !"

 

disque
Fidèle à lui-même et toujours aussi passionné, les années ne lui ont pas fait raccrocher le micro : "Même si je n’ai pas forcément toujours une grosse actualité, je continue de travailler sur plein de projets. Il n’y a jamais de temps mort pour moi !" Alors après la sortie de Fonds de tiroirs, son dernier projet en compagnie de Kefristo, son acolyte des débuts, quelle sera la prochaine étape pour Le Tigre ?

 

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* auto-tune : logiciel de correction de la voix à la mode chez certains rappeurs.